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Matthew Heller, rédacteur en chef d’Una Voce

Peu de personnes l’ont vu venir, et celles qui l’ont vu n’ont pas trouvé de moyen de l’éviter : le Kitchener-Waterloo Symphony (KWS) allait cesser d’exister à compter de 2024. Fondé en 1945, le KWS a été un pilier de la vie des arts dans une région en plein essor, reconnue comme une technopole et dotée de deux universités prestigieuses.

Son implosion a été un choc pour tous ceux qui n’étaient pas dans la salle du conseil du KWS : un manque catastrophique de liquidités, une saison annulée et une procédure de faillite. Mais cette triste histoire a connu un rebondissement : les musiciens et les membres de la collectivité se sont ralliés pour rétablir leur orchestre. Ils ont inversé le processus de faillite et rapidement protégé les atouts les plus précieux, à la fois humains et physiques. Étonnamment, ils sont en train de réussir tout cela. 

Kitchener s’imposait donc comme lieu pour la Conférence annuelle de l’Organisation des musiciens d’orchestre symphonique du Canada (OMOSC). Nous avons entendu les musiciennes du KWS Kathy Robertson et Rebecca Diderrich, le nouveau président du conseil d’administration, Bill Poole, et le directeur adjoint de la Division des services symphoniques pour le Canada, Richard Sandals, qui ont tous joué un rôle essentiel dans le rétablissement en cours. Et au-delà de ce grand retour, il y a des leçons à retenir pour les musiciens et les organisateurs, où qu’ils soient :

  • Faites l’effort de tisser des liens dans vos collectivités et de développer des alliances avant qu’une tempête ne frappe.
  • Examinez soigneusement les règlements généraux de votre association de musiciens, qui pourraient bien être l’élément qui permettra de tenir le fort. 
  • Ne sous-estimez pas les musiciens discrets dans votre orchestre, qui gardent le profil bas, mais qui ont des ressources incroyables à offrir dans les moments difficiles. 

En plus de Kathy et Rebecca, plusieurs musiciens du KWS se sont joints à nous pendant la Conférence. Pouvoir échanger avec eux a été un moment fort pour nous tous qui venons d’ailleurs. La contrebasse solo du KWS, Ian Whitman, qui a été coordonnateur des relations avec la collectivité, était là, et il a contribué un texte au présent numéro, sur les initiatives qui ont permis aux musiciens de maintenir leur présence au sein de leur collectivité. 

Égalité et harcèlement en milieu de travail 

Au cours de la dernière saison, de nombreuses personnes de notre industrie ont tenu des dis-cussions au sujet de la façon de traiter les femmes dans les milieux de travail symphoniques. Notre conférence à Kitchener a été une occasion d’en parler avec des musiciens et des dirigeants syndicaux de partout au Canada. 

Nous avons invité Jaime Martino et Michael Mori, tous deux directeurs du Tapestry Opera. Ils sont également les cofondateurs de Women in Musical Leadership, un organisme dédié à soutenir les chefs d’orchestre femmes et non binaires. Ils ont lancé une discussion au sujet d’attitudes qui imprègnent encore notre culture, et de façons dont nous pourrions réorienter nos manières de parler du leadership afin de rendre notre industrie plus accueillante. Comme nous l'a demandé Jaime : « Comment pourrions-nous faire en sorte que le futur de notre art soit aussi varié et intéressant que possible? »

Cela a mené à une présentation par le conseiller juridique de l’OMOSC, Michael Wright, et l’avocate Danielle Stampley au sujet du rôle des syndicats dans les cas de congédiement pour raisons non artistiques, y compris ceux opposant des musiciens d’orchestre entre eux. Nous avons le devoir de représenter tous nos membres, mais cela ne nous dispense pas de faire des choix complexes quant aux moyens à prendre pour que justice soit rendue. 

La directrice de la Division des services sym-phoniques, Rochelle Skolnick, elle-même avocate spécialisée en droit du travail, a donné une présentation sur l’inconduite et le harcèlement sexuel en milieu de travail symphonique. Elle s’est demandé pourquoi il est si difficile de maintenir des limites saines dans notre milieu de travail, et comment nous pouvons améliorer nos politiques et nos pratiques. Ce sont des discussions difficiles, mais essentielles.

Conférence OMOSC 2024

Nous souhaitons la bienvenue à Ethan, et adieu à Liz

Tout au long des quatre jours de discussions, les délégués se sont montrés curieux, passionnés et dévoués à rendre nos orchestres les meilleurs possibles. Pour ceux et celles parmi nous qui avons assisté à plusieurs conférences de l’OMOSC, entendre des idées et des façons de voir novatrices  de la part de nouveaux délégués est toujours très intéressant.Nous avons également invité plusieurs directeurs généraux afin qu’ils nous fassent connaître leurs points de vue et qu’ils participent à la conversation. 

La première vice-présidente de l’OMOSC, Elizabeth Johnston, violoniste à la Compagnie d’opéra canadienne, a mis un terme à 11 saisons consécutives comme membre de l’exécutif de l’OMOSC. Liz a été une fantastique défenseure des musiciens, une voix pour la clarté et la compréhension, et celle qui s’assurait que les contrats se signaient et que la Conférence aurait bel et bien lieu. C’est le violoniste de l’OSQ, Ethan Balakrishnan, qui a été élu pour la remplacer. 

Nous avons bien sûr traité de nombreux autres sujets : les affaires gouvernementales, la Caisse de retraite des musiciens du Canada, les enjeux liés aux lieux de travail, la qualité de la gestion, l’enregistrement des concerts à des fins de promotion ou par des membres du public, et plus encore. Cette saison, nous aborderons plusieurs de ces questions dans l’Una Voce

Nous avons dédié la Conférence à deux leaders syndicaux canadiens récemment décédés, Alan Willaert et Dave Jandrisch. Leurs legs nous rappellent que le travail que nous effectuons à titre de défenseurs des musiciens déborde de loin de la salle de réunion, jusque sur la scène et dans nos collectivités.